Le 29 juin dernier, l’Assemblée nationale a adopté, au terme d’une navette parlementaire intense et qui n’a pas permis l’éclosion d’un consensus, le projet de loi relatif à la bioéthique. 326 voix pour, 115 contre. Les mesures portées dans ce texte constituent des avancées indéniables, pour lesquelles nous avons apporté notre soutien humaniste et républicain.

La mesure phare du texte, promise par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle en 2017, est bien sûr l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes, y compris les couples lesbiens et les femmes seules. En effet, jusqu’ici, seuls les couples hétérosexuels souffrant de problèmes d’infertilité pouvaient recourir à la PMA. Plus qu’une question de bioéthique, il s’agit ici d’une mesure d’égalité, évoquée depuis 2013 lors de la loi sur le mariage pour tous. Il aura fallu attendre huit ans pour que cette avancée sociétale soit juridiquement inscrite. Un temps relativement long, pour nombre de femmes, et qui a pu conduire celles qui en avaient les moyens à une solution alternative plus coûteuse à l’étranger. On estime que cela concerne 2000 à 3000 femmes chaque année.

Une avancée bienvenue est également à souligner en ce qui concerne la filiation. Désormais, deux femmes (mariées ou non) pourront signer, devant notaire, une ‘’reconnaissance conjointe anticipée’’ de l’enfant à naitre, pour établir la filiation. Il était temps, puisque depuis la loi de 2013, les couples lesbiens font face à un mur pour établir leur filiation : mariage obligatoire, puis adoption de l’enfant du conjoint. Des procédures longues et complexes qui mettent en danger les enfants et les familles. En cas de séparation du couple ou de décès de la mère qui a accouché, la seconde mère n’a aucun droit sur ses propres enfants.

Malgré ces avancées, il faut souligner certains manquements dans ce texte de la majorité, dont le titre bien pompeux cache en réalité un catalogue de mesure souvent assez maigre. Un article publié sur le site internet de La France insoumise établit l’inventaire de ces manquements. Rien, par exemple, sur les personnes transgenres, qui restent exclues de la PMA. Dès lors, un homme transgenre, qu’il soit célibataire ou en couple, ne bénéficiera pas des mêmes droits selon qu’il a changé d’état civil ou non. La personne concernée demeure condamnée à arbitrer entre un état civil conforme à leur identité de genre, et leurs perspectives parentales. Rien, non plus, sur la mutilation des enfants intersexes, dont la version initiale du texte taisait le sujet. Ces opérations de mutilation visant à corriger un développement hormonal inhabituel chez l’enfant ont toutefois été abordées dans le cadre d’amendements. Mais le texte ne va pas assez loin. Il encadre les opérations, mais n’interdit pas clairement les opérations faites sans le consentement de la personne concernée. Ces transformations du corps sont des actes invasifs et définitifs entraînant de graves souffrances physiques et psychologiques. Ils sont parfois pratiqués sur de tout petits enfants, y compris des nourrissons. Ces opérations sont parfois faites sans qu’il y ait une urgence vitale, uniquement dans le but de conformer l’aspect des organes génitaux à ce qui est attendu socialement. Enfin, aucune disposition dans ce projet de loi ne vise à garantir le droit à mourir dans la dignité. Nos amendements sur le sujet ayant été jugés irrecevables, le gouvernement refuse d’aborder le sujet. Pourtant l’actualité nous rappelle l’urgence d’ouvrir ce débat de société.

Alain Cocq, français de 58 ans victime d’une maladie orpheline incurable, et militant depuis des années pour le « droit à mourir dans la dignité », est mort par suicide assisté en Suisse le 15 juin dernier. Cet exemple d’un citoyen français, qui a fait le choix de disposer librement de son corps jusqu’à sa mort, pourrait motiver à lui seul les propositions portées par notre mouvement. Nous souhaitons inscrire dans la loi le droit à mourir dans la dignité, i.e. le droit au suicide assisté et à l’euthanasie, pour garantir cette libre disposition de son corps. De même, et pour répondre aux dispositions évoquées précédemment, nous portons l’idée d’une interdiction, en dehors de l’urgence vitale, d’atteinte à l’intégrité du corps d’une personne. Il s’agit donc, pour les enfants intersexes, de garantir leur protection, en subordonnant toute opération chirurgicale sur leur corps à leur consentement personnel explicitement exprimé, à un âge où l’enfant est en mesure de comprendre les enjeux associés à cette décision lourde de conséquences. Enfin, concernant le volet PMA-filiation, nous garantirons l’extension de la PMA à toute personne indépendamment de son orientation sexuelle, de son statut marital, ou de son identité de genre. Les couples de femmes devront également avoir accès à la reconnaissance simple en mairie, à la présomption de parentalité (comme le mari est supposé être le père d’enfant de son épouse, quand ils sont mariés), ainsi qu’au droit réel à l’IVG (accès effectifs à des centres dédiés, allongement des délais de 12 à 14 semaines).